rue de Mashteuiatsh

Ce matin je suis allée à l'église de Mashteuiatsh. Le curé en préambule a dit "craignez le seigneur si vous ne marchez pas dans les pas de l'Evangile...". Une messe à Bordeaux ou à Mashteuiatsh c'est toujours pareil. En premier était le verbe alors pourquoi toujours évoquer la crainte et le péché ? Plus tard dans l'après midi j'ai marché dans la réserve profitant d'une éclaircie. Les routes sont vides. Il n'y a que des voitures qui passent inexorablement et leurs bruits de moteur qui perturbent le son des vagues. Ici, lorsqu'on marche on est seul. Je peux juste apercevoir quelquefois des silhouettes en perdition. Ici, personne ne se déplace à pied, il y a juste des errances . J'ai photographié ces rues vides. J'ai trouvé au bout de la route qui borde l'église, une vierge immaculée entourée d'enfants de plâtre agenouillés. Ils sont recueillis devant la plaque commémorative qui dit " 1889, arrivée des pères oblat de l'immaculée conception, 1962 bénédiction de la statue de notre Dame de Fatima en arrière du pensionnat", là où des centaines d'enfants autochtones ont été enfermés de forces, enlevés à leurs parents, privés de leur langue et de leur coutume, nettoyés à l'eau de Javel pour devenir plus blancs. Depuis quelques années le Gouvernement Canadien a entrepris de dédommager ces victimes mais il n'y a toujours aucune excuse officielle et cette vierge érigée là honore le génocide du peuple des premières nations. Les pires horreurs peuvent s'écouler sur un vernis de bonne conscience. Aujourd'hui le Pape a exprimé ces regrets mais ne s'excuse pas . C'est un héritage douloureux qui pour Claude Boivin, que j'ai rencontré il y a quelques jours, se paye exactement de 15 amis de sa classe d'âge qui se sont suicidés. J'ai préféré me plonger dans l'obscurité complète de la tente suante aux sons du tambour et d'un chant de guérison, hier soir à la pleine lune, au bord du lac déchaîné.