l'école Amishk

Tshinishkumitin c'est merci en ilnu et j'ai vraiment envie d'exprimer ma gratitude auprès de la communauté de Mashteuiatsh aujourd'hui. La gratitude est une valeur importante pour les autochtones comme le partage. ll s'agit d'une gratitude qu'on exprime, d'un partage qu'on réalise. Dans ce merci il y a nishk c'est l'outarde parce qu'avant pour se remercier les gens s'offraient du gibier. ll y a une multitude d'outardes dans le ciel et aux alentours en ce moment, c'est leur période de migration. Elles arrivent du grand nord et restent quelques semaines par ici. Elles exécutent de belles figures devant les nuages et leurs cris s'amplifient au coucher du soleil. Ensuite, elles s'envoleront vers le sud des Etats Unis.

Je viens de passer un moment merveilleux à l'école Amishk avec Marie-Eve Courtois,enseignante en art et ses amis . Elle appelle ses élèves "mes amis". Il y a une autre enseignante avec elle, qui enseigne la langue ilnue. Le cours démarre par un temps de relaxation où chaque enfant se figure être un arbre qui capte de tous ses sens l'énergie positive autour de lui. Il passe ses mains sur ses yeux, ses oreilles, embellit son visage d'un sourire, remue ses bras comme des branches. ll y a une colombe dans une cage et si elle chante trois fois, les enfants peuvent la libérer pour qu'elle vole dans la classe. Il faut du calme et de la sérénité pour qu'on puisse l'entendre chanter.

J'ai rencontré les élèves de la classe de 1er année (équivalent de notre CP) qui ont pour animal totem la perdrix. J'ai demandé aux enfants de se présenter et de parler de ce qu'ils aiment. Beaucoup ont exprimé leur goût pour la vie dans le bois, la chasse à l'orignal, les danses du Pow Wow. Migoun (Plume) danse le papillon, Maïna est une danseuse clochette. Ils aiment aussi ramasser les bleuets, faire du hockey sur glace et du base ball... Quand j'ai dit à Xavier qu'il n'y a pas trop de chasseurs en France, il m'a dit avec un air sidéré "mais comment vous faites pour manger si vous n'allez pas chasser ?"

J'ai pu avancer sur le projet d'échange avec les écoles de Bègles. Nous avons évoqué l'idée de créer un blog spécifique qui pourrait être à la fois animé par les enseignantes de Bègles et de Mashteuiatsh. J'aimerais que l'on trouve ensemble un titre en français et en ilnu qui correspond à notre envie de partage et de reconnaissance mutuelle. Francine Riverin, coordonnatrice de l'enseignement de l'ilnu me dit que l'école adhère à un programme social sur le thème "ici et ailleurs". Fantastique ! En parlant avec les enfants, j'ai pu noter à quel point leur histoire, leur identité, leur tradition sont des notions importantes. Ils sont très jeunes et l'on sent déjà chez eux comment la transmission opère. Ils partent sur le territoire avec leur père, leur grand-père. Ils apprennent le nom des arbres, les traces d'animaux, les quatre points cardinaux, la coupe du bois... C'est merveilleux d'écouter un petit bonhomme de 8 ans parler de la danse sacrée du pow wow, de son régalia (son costume) fabriqué dans sa famille et qui chaque année doit être différent, des plumes d'aigles, du bois, de la terre-mère... Et en même temps ces enfants sont semblables aux enfants de France ou d'ailleurs, ils vivent dans des maisons comme nous, regardent la télévision et utilisent l'ordinateur.