l'autobus de l'école

Aujourd'hui les rencontres se sont succédées, j'ai vraiment l'impression que mon projet commence vraiment avec des images à faire, des paroles à entendre et à enregistrer. Je trouve sur mon chemin des personnes remarquables qui me livrent déjà beaucoup d'elles même. Depuis hier, j'écoute des mots de souffrance et de honte, des suicides à tour de bras, des enfermements au fond des pensionnats catholiques, des vols de terre pour une bouteille, des falsifications identitaires pour quelques privilèges, des relégations au bout de la réserve, des addictions à l'alcool et aux drogues comme seul échappatoire ... Des mots si terribles que j'ai eu envie de pleurer.

Quelqu'un m'a dit que la terre sous sa maison appartient à la reine d'Angleterre et à la surface au conseil de bande. Il a juste un droit d'occupation du sol. Les indiens ne possèdent pas grand chose. Avant, les parents et les grand-parents vivaient dans le bois et revenaient juste l'été pour le rassemblement des familles. Les terres dont ils jouissaient au bord du lac ont été d'une manière ou d'une autre volées pour quelques bouteilles d'alcool, de la farine, du lait ou pour une date dépassée de quelques jours sur une reconnaissance de dette.




J'ai commencé ma journée par la visite de l'école Amishk avec sa directrice Nathalie Dominique. J'étais pleine d'entrain pour lui parler de mon désir de voir s'établir un échange entre les écoles de Bègles et l'école de Mashteuiatsh. Nous avons parcouru ensemble les couloirs, salué un bon nombre d'enseignantes à qui elle m'a présentée. J'ai vraiment eu l'impression que les enfants avaient une grande liberté de mouvement à l'intérieur des classes et que l'ambiance y était bien sereine . Je pourrai vérifier ça dès la semaine prochaine puisque je suis invitée dans la classe d'art plastique toute une matinée pour un cours autour de l'art et de la langue Innue. Chaque classe a un animal totem pour l'année scolaire que les enfants représentent de façon personnelle avec différents supports. J'ai vu beaucoup de capteurs de rêves et de magnifiques totems fabriqués par les élèves. En sortant de l'école j'ai photographié l'autobus qui amenait des petits au salon du livre du Saguenay-Lac Saint-Jean. Sous la bruine froide, j'ai ensuite rejoint le musée autochtone pour rencontrer la directrice Maryse Boily. Elle m'a reçu chaleureusement en compagnie d'une de ces collaboratrices Eruoma Awashish qui est aussi une jeune artiste diplomée de la faculté d'art de Québec à Chicoutimi. La communauté est une mine d'artistes et d'artisans qui oeuvrent à partir d'un savoir faire traditionnel pour aller vers une créativité vraiment contemporaine. Au musée, je ne me lasse pas de contempler ces magnifiques "autels"-totems faits de peaux, perles, plumes, terres, fourrures, bois, toiles, pierres qui me parlent si fort des racines, des temps anciens et me projettent aussi dans la douleur et la grandeur d'un peuple d'aujourd'hui. Ce sont des artistes comme Diane Blacksmith, Maude Connolly, Bernard Connoly et d'autres si fiers de leur création, de leur savoir faire et leur savoir transmettre que je peux rencontrer aujourd'hui et que je remercie.